Cet article est issu de longues discutions entre danseurs et protecteurs puristes du casino cubain et des danseurs de salsa et du point de vue de Sony, un défenseur investi du casino cubain.
Pour rappel le « casino » est le nom original de la salsa cubaine, qui est devenu « salsa » lorsque les Américains lui ont cherché un nom plus commercial et exportable dans le monde entier. Dans le casino, l’homme et la femme, le leader et le follower ont des places et rôles distincts.
Dans cet article de votre site de danse en ligne, nous allons vous expliquer ce qu’est un guapea (appelé dilequesi dans de nombreuses écoles de danse), qu’implique-t-il, comment se danse-t-il, etc.
Le guapea c’est quoi ?
La majorité du temps, les noms des mouvements ou passes ont un sens en salsa ou casino, comme le « sombrero » dont le mouvement se termine par un chapeau, puisque le sombrero est un chapeau. Dans la même veine, le « vacila », qui signifier « mater » en Cubain, implique une interaction entre l’homme et la femme, où l’homme évalue/mate sa partenaire pendant son tour.
Mais, certains autres mouvements comme le guapea, un pas de base de la salsa et du casino, semblent perdre de son sens original dans la manière dont il est utilisé en danse salsa.
Le « guapea », dérivé du verbe « guapear » évoque dans l’argot cubain une attitude de fanfaronnade, de frime, d’arrogance ou de bravade. C’est une expression très ancrée dans la culture cubaine et elle peut désigner un comportement ostentatoire ou combatif.
Cependant, dans le cadre de la danse, la salsa, elle perd son sens premier. En effet, vous pouvez visionner des centaines de vidéos de salsa sur Instagram ou Youtube, vous observerez une absence, un appauvrissement ou une forte diminution de l’intensité de l’attitude que suggère le guapea, laissant place à une interprétation douce, parfois vide, en tout cas moins expressive que ce que l’expression suggère.
Comprendre c’est apprendre et comprendre le sens des mots et des expressions permet de redonner du sens aux passes et pas, d’ajouter des nuances dans l’attitude, dans la communication des émotions et de conserver un aspect culturel.
En dehors de Cuba, dans des cours de danse salsa comme en Europe, le guapea, parfois appelé « dilequesi » (di le que si = dit lui que oui) est utilisé dans une rueda comme un pas de remplissage, le temps que tout le monde soit synchronisé, ou le temps que la madre (ou « cantante », personne qui annonce la passe suivante) réfléchisse à ce qu’elle va annoncer.
Le guapea ou le dilequesi est donc omniprésent entre chaque passe ou pas, négligeant l’importance de ce pas qui n’est pas un pas d’attente, mais un vrai pas, habité, incarné et riche. De fait, ce pas important peut être séparé de son contexte culturel et émotionnel.
L’apprentissage par la rueda, bien qu’utile pour les débutants, peut donc parfois limiter la compréhension de la danse comme une conversation et un jeu entre les partenaires, où chaque mouvement, y compris le « guapea », est une expression de relation, d’émotion et d’histoire. Cette dynamique est essentielle dans l’expérience du casino cubain, qui, dans son essence, est une danse fluide, pleine d’improvisation et d’interaction personnelle, plutôt qu’une séquence rigide de mouvements exécutés comme par des robots.
Maintenir l’intégrité des mouvements au sens large permet de conserver l’aspect culturel et historique. Pour celles et ceux qui pratiquent la danse de casino en dehors de Cuba, cela peut signifier d’approfondir leurs connaissances sur la culture cubaine, à reconnaitre les nuances de la musique et de la danse et à s’engager dans une pratique qui célèbre l’origine et l’esprit de ces expressions.
Voici 3 vidéos courtes qui illustrent ce qu’est un guapea :
Vous noterez certainement facilement la différence d’attitude entre ce guapea et celui enseigné dans les écoles de danse occidentales.
Le lien entre le guapea et la musique
Certaines musiques de salsa invitent à la « guaperia », attitude arrogante et prise de confiance, permettant d’utiliser ces caractéristiques pour effectuer des mouvements forts en interprétation et attitude. Il y a des moments clefs dans les chansons de salsa qui invitent à tout cela (bomba, presión, masacote,…).
Ce n’est pas un hasard si ceux qui expriment la « guaperia » sont la grande partie du temps des hommes, car culturellement dans cette danse, il ne convient pas à une femme d’agir avec guaperia. Elle peut se montrer, mais pas de cette manière, c’est peu féminin comme attitude, comme dans le cas du vacila.
Dans la vidéo suivante, la « presión » se déroule de 2min à 2min19 et la « masacote » entre 3min02 et 3min23 :
Vous devriez ressentir cette différence entre la masacote et la presión, comparativement à ce qui vient avant et après ces passages. Il y a un vrai changement dans l’instrumentation et c’est un moment parfait pour la « guaperia ».
De même ici dans cette vidéo, de 4min20 à 4min29 ici :
Dans le cadre d’une danse de casino ou salsa en couple, voici comment cela peut s’intégrer, dans cette vidéo à 2min51 :
Ou encore ici à 3min24 :
Ce qui n’est pas un vrai guapea cubain pourrait être appelé autrement comme « dilequesi » (utilisé dans de nombreuses écoles), « abre y cierra » (ouvert et fermé)
L’enseignement de la salsa ou du casino hors de Cuba
Cette réflexion est importante pour les professeurs de danse qui enseignent en dehors de Cuba de transmettre la signification des noms des pas et des passes, ce qu’ils impliquent culturellement et émotionnellement, pour préserver l’histoire originelle qui accompagne chaque pas de cette fabuleuse danse.
Le guapea est bien plus qu’un simple pas de danse dans la rueda de casino. C’est une invitation à explorer et à célébrer la richesse de la culture cubaine, à travers la musique, la danse et au-delà.
En approfondissant la compréhension de ce qu’inclut « guapea » et en pratiquant le casino cubain avec respect et authenticité, l’expérience des danseurs est très enrichie ET contribue à la préservation et à la transmission d’une tradition culturelle vibrante et significative.